A travers la série Traces, Julien Fleurance approfondi son approche du corps et sa capacité à contenir, en tant qu’objet, sa propre histoire. Ces photographies sur lesquelles on distingue, en gros plan, des parties de corps nus sans visages, ont été travaillées de sorte à rendre visible les nervures et les lissés de la peau. Ses marbrures révélées lui confèrent alors un aspect terreux, minéral. Etymologiquement, le terme « trace » revêt trois sens, qui permettent de mieux appréhender cette recherche photographique : une empreinte physique, ce qui reste d’un événement passé ou encore une quantité infime
d’une substance quelconque. C’est de tout cela que traite la série. La surface du corps est le support de marques physiques qui déterminent son âge et par conséquent une histoire. La peau, et par extension le corps lui-même, peuvent dès lors être considérés comme une représentation graphique de la vie qui a vu apparaître ça et là rides, cicatrices ; autant de traces des bonheurs et des douleurs qu’il a traversé. Ce corps constitue aussi un vestige du temps qui passe ; observé en tant qu’objet il permet de dater l’existence de l’individu, et d’en envisager voire d’en anticiper l’évolution. Se focalisant sur ces marques, ces plis, plus ou moins visibles, Julien Fleurance retrace l’expérience des corps qu’il fige dans l’instant, en commençant la série par la photographie d’un nourrisson et en l’achevant par celle d’une personne âgée. Julien Fleurance associe à chaque image un titre en langue ancienne (latine, persane, africaine…) qui se rapporte au lieu de la prise de vue. Cette composante met en exergue la relation entre le corps-objet, sculptural,
et le milieu dans lequel il évolue et duquel il s’imprègne.
(Texte Elodie Goux)
«Je me constate, j’ai vieilli et les marques de mon passé sont autant de traces qui affublent mon corps.
Mon corps est infiniment gravé des aléas de mon histoire, mes blessures et mes victoires.
Je me vois donc je suis, extérieur à celui-ci mais aussi instigateur omniscient.
Et que raconte alors l’environnement sur ma peau, n’est-il pas là aussi une
transcription plastique de mon histoire ?
Je me voûte au fur et à mesure, mon corps réimprimant inlassablement les
coups de fouet de chaque année, de chaque coup de pioche donné à la terre.
Ne veux-tu donc pas t’attendrir sur mes ongles, ils sont là le reflet de ma réflexion
sans cesse activée par mon inconscient, et j’en fige la contraction.
Mais qu’est-ce donc que cette fente qui cisaille tout mon corps. Comme pour lui dire au
combien je suis être de désir.»
JF
(Text Elodie Goux -Traduction Eva Sow)
« I notice myself, I got older and marks of my past are as many traces that deck my body out.
My body is infinitely engraved with the hazard of my story, my wounds and my victories.
I see myself so I am, outside of it but also omniscient instigator.
And what tells the environment on my skin, is it not a plastic transcription of my story?
I vault little by little, my body endlessly reprinting lashes of each year, each sod given to the earth.
Do not you want to be moved by my nails, they are here as the reflection of my thoughts
continually activated by my subconscious, and I freeze the contraction.
But what is that crack which shears my whole body. As a way of telling it that I am a being of desire »
Julien Fleurance
Irputmani
Lombrik
Ombilik
Malid
Pedis
Embryon
Crux
Lombik